Les rapporteurs spéciaux de l’ONU dénoncent un projet de loi français reforçant les sanctions pour l’occupation illégale

(30 mars 2023) – Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l’homme et le pauvreté extrême, Olivier De Schutter, et le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à un logement convenable, Balakrishnan Rajagopal, ont, dans une lettre adressée au gouvernement français, fait part de leur inquiétude concernant un projet de loi renforçant les sanctions pour l’occupation illégale de logements et de bâtiments commerciaux.

Le projet de loi, qui a également fait l’objet de critiques de la part d’organisations de la société civile, du Défenseur des Droits et de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, renforcera fortement les sanctions pour le squat de logements et de bâtiments, le rendant passible d’une amende pouvant aller jusqu’à 30 000 euros ou de deux ans d’emprisonnement.  En outre, le fait de rester dans un bâtiment ou une habitation après un ordre d’expulsion – alors qu’ils étaient occupés légalement – peut être sanctionné par une amende de 7 500 euros.

Étant donné qu’environ 95 % des expulsions en France sont liées à des loyers impayés ou à d’autres frais de logement, la loi expose les personnes vivant déjà en grande partie dans des situations précaires à un risque de criminalisation, au lieu d’assurer l’accès à d’autres logements adéquats et abordables, dont l’offre est insuffisante dans de nombreuses villes et régions de France.

Les rapporteurs spéciaux sont préoccupés par le fait que la nouvelle loi accélère les procédures d’expulsion, en réduisant de manière significative le temps dont disposent les locataires pour rembourser les loyers impayés ou trouver un autre logement avant d’être expulsés. Dans le même temps, le pouvoir des juges d’accorder un délai supplémentaire aux locataires pour rembourser leurs dettes serait réduit en vertu de la nouvelle loi, limitant la période à un an maximum, contre trois ans actuellement.

La nouvelle loi étendrait également les expulsions accélérées controversées de la France, qui donnent aux individus seulement 72 heures pour quitter une propriété sans l’intervention d’un juge ou l’offre d’un autre logement ou hébergement. 

Dans leur lettre, les rapporteurs spéciaux ont également exprimé leur inquiétude quant au fait que le projet de loi initial aurait rendu la « propagande ou la publicité » pour l’occupation irrégulière de logements ou de bâtiments commerciaux passible d’une amende de 3 750 euros, mettant ainsi en danger les défenseurs du logement et des droits de l’homme ainsi que d’autres organisations de la société civile qui aident les personnes risquant de devenir sans-abri ou de vivre dans l’informalité.

Le projet de loi a été adopté le 4 avril 2023 par l’Assemblée nationale avec quelques modifications et a été transféré au Sénat pour approbation finale.

Photo: LoboStudio Hamburg/Unsplash

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Date:
6 April, 2023
Themes:
Courts Systems
Frais et Amendes
Droits humains
Countries:
France
Regions:
L'Europe
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